Rupture du PIPE-LINE d’Ile-de-France (PLIF) à Autouillet

Octobre 2021

Les conséquences de la rupture du Pipe-line d’Ile-de-France à Autouillet, dans la Plaine de Versailles, en février 2019

Mise à l’arrêt du PLIF suite à la fuite de Février 2019 à Autouillet, en Plaine de Versailles, … et après ?

Les articles précédents publiés par Yvelines Environnement relatent l’incident de la rupture, ses conséquences sur l’environnement, les décisions du représentant de l’Etat pour la remise en état des lieux et pour prévenir tout nouvel incident sur cette conduite.

Les contrôles effectués sur la conduite pendant plus d’un an, alors que la pression d’exploitation avait été diminuée, par décision des Services de l’Etat, ont mis en évidence les risques de poursuivre l’exploitation de cette conduite dans les conditions nominales qui permettaient la rentabilité de l’installation.

Pour retrouver les conditions optimales de débit du PLIF, l ’analyse des experts de l’exploitant, confirmée par le Bureau Véritas, ont conduit à la conclusion que la seule solution est de reconstruire intégralement le PLIF.

Le coût d’une telle mise en œuvre serait estimée à plusieurs centaines de millions d’euros et le délai de réalisation à plus de 6 ans pendant lesquelles la raffinerie serait à l’arrêt.

L’analyse du marché du raffinage et les orientations retenues en terme de transition énergétique ont conduit Total Energy à une réflexion sur la transformation industrielle des sites de Grandpuits et Gargenville vers de nouvelles activités, présentées dès septembre 2020 :

  • « la production sur le site de Grandpuits de biocarburants majoritairement destinés au secteur aérien qui seront stockés et transférés notamment sur l’aéroport Roissy Charles De Gaulle depuis la plateforme de Gargenville via le pipeline TRAPIL,
  • la production de plastiques biosourcés, recyclables et compostables,
  • le recyclage de plastiques,
  •  l’exploitation de deux centrales solaires photovoltaïques.

Le projet d’unité de production de biocarburants

La bioraffinerie transformera 400 000 t par an de matières végétales, de graisses animales et d’huiles de cuisson usagées pour la production de 170 000 t par an de biocarburants aériens, 120 000 t par an de biocarburants routiers et 50 000 t par an de bio naphta (principalement utilisé dans la pétrochimie pour produire par exemple de l’éthylène et du propylène qui permettent eux-mêmes de produire des matières plastiques).

Le biocarburant aérien sera destiné aux aéroports parisiens pour contribuer à la feuille de route française pour le déploiement des biocarburants aériens durables qui comporte un objectif d’incorporation de biocarburants de 2 % à horizon 2025 et de 5 % à horizon 2030.

Le projet d’unité de production de plastiques biosourcés

La première usine de PLA (acide poly lactique) en Europe sera construite à Grandpuits dans le cadre d’une JV entre Total Energies et Corbion qui deviendra ainsi le numéro 1 mondial du PLA, un polymère biosourcé, recyclable et compostable.

Cette unité permettra la production de 100 000 t par an de PLA à l’horizon mi 2024 et permettra de répondre à la demande d’un marché en forte croissance (+12 à 15% par an).

Le PLA sera produit à partir d’acide lactique lui-même produit par Corbion à partir de sucre (de betterave, de canne à sucre) ou d’amidon (de blé, de mais, etc.).

Le projet d’unité de recyclage des plastiques

La première usine de recyclage chimique de France sera construite à Grandpuits dans le cadre d’une JV entre Total Energies (60%) et Plastic Energy. Elle permettra le recyclage de 15 000 tonnes/an de déchets plastiques pour en faire 10 500 tonnes/an d’huile de pyrolyse d’ici début 2023.

Elle sera basée sur une technologie innovante de Plastic Energy qui consiste à fondre des déchets plastiques complexes issus des poubelles jaunes, qui auraient fini par être enfouis ou incinérés (comme 75% des déchets en France), pour obtenir une huile appelée « Tacoil ». Cette huile permet de fabriquer, après transformation, des polymères présentant des qualités identiques à celles des polymères d‘origine fossile et compatibles avec le contact alimentaire.

Ce projet contribuera à l’objectif de 30% de matières recyclées dans les ventes de polymères de la compagnie Total Energies d’ici à 2030.

Les fermes solaires

Les plateformes de Grandpuits et Gargenville produiront 52 MWc d’électricité d’origine solaire d’ici début 2022 grâce à la construction de deux fermes solaires, l’une de 28 MWc à Grandpuits et l’autre de 24 MWc à Gargenville.

La puissance installée représente l’équivalent de la consommation électrique de 30 000 personnes. Les deux fermes solaires contribueront à l’ambition de Total Energies de fournir de l’électricité verte à l’ensemble de ses sites industriels en Europe.

Les activités de stockage et de distribution

La plateforme de Gargenville aura pour mission de réceptionner, de stocker et d’expédier les biocarburants aériens produits à Grandpuits vers les aéroports parisiens. Elle s’occupera également de réceptionner/expédier des produits via le réseau de pipelines TRAPIL et de stocker des produits pétroliers dits stratégiques …. »

Mais que deviendra la tuyauterie existante, après la cessation d’activité du pipe-line, connaissant son mauvais état, qui ne fera qu’empirer puisque toute maintenance aura cessé, en particulier les dispositifs permettant de contrôler la corrosion ?

Quelles seront à terme les conséquences des fuites de résidus de pétrole et de métal oxydé sur les terres et sur la nappe phréatique ?

Il faudra que l’Etat et l’exploitant donnent rapidement des réponses à ces questions !

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Juillet 2020

Suite de l’article de Patrick Menon paru dans les Brèves de Janvier 2020

La légitime inquiétude des riverains et des associations qui n’ont pas d’information précise depuis la réunion du 19 novembre 2019 à Autouillet.

Depuis cette réunion :

  • Deux arrêtés préfectoraux, du 19 décembre 2019 et du 30 janvier 2020, portent sur les restrictions de circulation sur les communes d’Autouillet et de Boissy-sans-avoir dans le cadre du chantier de dépollution des terres suite à la fuite d’hydrocarbure.
  • Un arrêté préfectoral,  du 16 juin 2020, porte sur l’état et l’exploitation de la canalisation (PLIF).

Que dit ce nouvel arrêté, qui pose en fait la question fondamentale de l’état du Pipe-line à assurer sa fonction en toute sécurité.

Pour mémoire : dans la nuit du 24 au 25 février 2019, une rupture de pipeline Ile-de-France a provoqué une fuite de pétrole, impactant des parcelles agricoles sur les communes d’Autouillet et de Boissy-sans-Avoir, et la pollution de cours d’eau dont le Lieutel, et en partie la Mauldre.

Tracé du PLIF du Havre à la raffinerie de Grandpuits

Opérations de dépollution sur les cours d’eau – Point au 22 mars 2019

L’arrêté préfectoral du 16 juin 2020 concerne :

  • Les conditions d’exploitation du Pipe-line imposés par l’Etat à TOTAL compte tenu des résultats des contrôles effectués sur le Pipe-line depuis la connaissance de la cause de la rupture à Autouillet et de divers contrôles.En l’occurrence l’imposition d’un abaissement de la pression à 42 bars sur l’ensemble du tracé, et la limitation d’opérations « Rétro-PLIF » à deux par mois.
  • Les contrôles métallurgiques du Pipe-line imposés par l’Etat à TOTAL, par tous les moyens adaptés et dans un délai donné, pour permettre l’expertise par un tiers visant à déterminer la pertinence des hypothèses retenues et d’assurer la sécurité en fonctionnement.
  • L’injonction faite à TOTAL de prendre toutes les dispositions nécessaires pour diminuer et optimiser le nombre et l’amplitude des cycles de pression subis par le PLIF. Un bilan mensuel doit être transmis à la DRIEE.
  • L’injonction faite à TOTAL de fournir avant le 30 juin :
    • Une étude relative à la baisse de pression opératoire du PLIF,
    • Une étude approfondie relative à l’ajout de stations de pompage sur le tracé de la canalisation,
    • Une étude sur le passage en ligne des racleurs de nettoyage.
  • La mise à jour par TOTAL du plan de surveillance et de maintenance du PLIF,

Le passage dans un délai de deux mois après mise en route d’un racleur instrumenté d’un détecteur de fissures longitudinales sur l’intégralité du PLIF, différemment de ce qui avait été fait en 2018 et 2019. Priorité est demandée au tronçon SP6-SP7 (entre les raffineries de Gargenville SP6 et de Grandpuits SP7).

  • Une étude par TOTAL, avant le 31 décembre 2020, sur la réalisation d’un test en pression sur le tronçon SP6-SP7.
  • Une étude technico-économique, fournie par TOTAL, pour le 31 décembre 2020, de remplacement des tronçons les plus sensibles du PLIF situés entre station SP6 et SP7.

Les riverains et les associations, en prenant connaissance de cet arrêté, demandent la tenue d’une réunion, fonction des impératifs sanitaires, permettant d’être informés et de comprendre l’évolution de la situation qui a conduit à cet arrêté préfectoral.

Ils demandent de plus à connaître l’état « des lieux » suite à l’application de cet arrêté et de ses précédents, concernant en particulier la remise en état de l’environnement pollué.

Patrick Menon – 07/2020

Lien vers l’article de janvier 2020 :